Cette recherche a pour objectif de confronter un principe classique du droit administratif, à savoir le principe de continuité du service public, aux évolutions des droits européen et international (que nous désignerons comme étant le « droit supranational »). Nous observerons, dans deux de ses applications particulières, à savoir la l’impossibilité de mettre en faillite une personne morale de droit public et les restrictions à la grève dans le secteur public, les réactions du principe de continuité par rapport à un droit supranational parfois – du moins en apparence – contraire. En effet, en ce qui concerne la grève, le droit international garantit désormais ce droit, sans distinction entre le secteur public et le secteur privé. En ce qui concerne la faillite des entreprises publiques, le droit de la concurrence européen semble considérer que l’impossibilité de mettre en faillite une entreprise confère à celle-ci un avantage constitutif d’une aide d’État illégale.
Notre recherche se structurera en trois temps distincts. Dans un premier temps, nous nous attacherons à réaliser un état de l’art quant au principe de continuité, afin de déterminer le plus précisément possible sa portée en droit interne. Nous mobiliserons, à cette fin, les origines françaises du principe qui ont largement inspiré la doctrine belge. Nous consulterons également la jurisprudence des juridictions supérieures belges – Cour de cassation, Cour constitutionnelle, Conseil d’État – eu égard à la nature de principe général de droit du principe de continuité.
Dans un deuxième temps, nous examinerons, dans les cas plus particuliers de la faillite des entreprises publiques et de la grève dans le secteur public, la position du droit supranational et son influence sur le principe tel que déterminé dans la première partie de notre recherche. Pour cela, nous commencerons par identifier les points de tension entre le principe de continuité et le droit supranational avant d’examiner comment le principe de droit interne réagit – ou ne réagit pas – à ces tensions. Nous nous interrogerons également sur la façon dont le droit supranational reçoit – ou ne reçoit pas – le principe de continuité, en admettant – ou non – des dérogations au droit de la concurrence et au droit de grève basées sur des impératifs de continuité.
Dans un troisième et dernier temps, nous tenterons de retirer de notre analyse inductive des traits communs aux évolutions du principe identifiées dans la deuxième partie de notre recherche afin de réinterpréter le principe de continuité et, peut-être, clarifier son statut en droit interne, parfois qualifié « d’aléatoire ».