Par Vincent de Coorebyter, « L’Internet : démocratie ou démagogie ? », dans Yves Poullet (dir.), Vie privée, liberté d’expression et démocratie dans la société du numérique, Larcier, 2020, p. 245-253.
Transparence ou opacité ? Ombres ou lumières ?
Entre ces extrêmes.
Oscille notre société du numérique.
Faut-il avoir peur de la transparence ou, à l’inverse du secret ? À y regarder de près, la réponse est complexe. Une transparence pour quoi faire et au profit de qui ? Un secret : pour quoi faire et pour qui ?
Transparence, une transparence asymétrique à l’heure d’un Big Brother de plus en plus opaque et de citoyens de plus en plus surveillés. Ne faut-il pas réinventer le droit au secret, à la déconnexion?
Transparence, à l’heure où chacun, blogs et réseaux sociaux aidant, s’érige en journaliste et où la mémoire des moteurs de recherche enregistre nos faits et gestes pour l’éternité. Entre destructeurs et « chiens de garde » de nos démocraties, nous voilà désormais inondés jusqu’à la nausée d’informations « privaticides », fausses, haineuses, racistes, de « fake news ». Le droit est invité à se pencher sur les conflits ainsi générés, d’une part, entre libertés, en particulier, la protection des données versus la liberté d’expression et, d’autre part et surtout, entre intérêt général et liberté d’expression.
La démocratie réclame la transparence des technologies utilisées et de ceux qui les utilisent. Elle fonde la liberté d’expression, garantit nos secrets tout en leur imposant des limites. La démocratie exige surtout de chacun qu’il veille à l’intérêt général. Que devient cette démocratie, lorsque la technologie et ses acteurs guident ou dictent les choix des gouvernants, grippent les rouages traditionnels de la gouvernance, renforcent les contrepouvoirs, etc. N’est-elle pas, à l’heure du numérique, condamnée à inventer de nouveaux modes, sans doute plus participatifs, de communication, de discussion, de délibération, de décision et d’application de ses décisions?